top of page

Un Voyage en Palestine/2017

Chapitre 2

 

Voilà c’est fait !

Eh bien oui, j’y suis retourné, après avoir connu des moments à la fois de bonheur, d’angoisse, de solitude et d’émotions intenses en 2016… mais quelle expérience !…

Celle de vivre sa vie avec intensité !

Evidemment cette année n’a pas été la claque de l’année dernière… j’ai pu réfléchir, me renseigner, comprendre mieux (mais jamais complètement) ce que j’avais vécu… Pouvoir comprendre aussi pourquoi j’avais tant envie d’y retourner… Aller plus loin dans la démarche… sans se retourner.

Offrande et Compassion fût le titre de mes vœux cette année et ça tombe bien !

Plus que jamais la vie nous offre des opportunités, pleine de défis pour déglinguer un peu notre train-train quotidien et nous mettre face à la réalité, que nous vivons finalement dans un luxe à la fois éphémère et aléatoire. Les leçons de vie sont primordiales et elles nous font avancer positivement dans nos projets personnels mais aussi dans la façon dont on peut s’occuper des autres et donner de soi. Pleurer n’est pas une aberration. On regarde souvent une série policière sans broncher, où les cadavres et les morgues sont juste une image, les pleurs juste un divertissement… sans vraiment réussir à se mettre dans la peau des personnages… Mais essayez juste une fois, d’y entrer à fond, sans rien pour vous distraire, et vous comprendrez toute la différence… Partir à Hébron, finalement, c’est un peu la même chose, sauf que finalement on n’a pas d’autres choix que de vivre le moment dans sa vérité et avec toute son intensité, à la fois dans les gestes et les sentiments…

Les murs sont toujours là, tagués de mille éclats et d’étincelles émotionnelles. Prendre quelques instants pour s’y concentrer, les comprendre car tout y est ! Pas besoin d’aller plus loin.

Oui, toujours là les murs, hobbies de politiciens affamés de pouvoir et de nations sans couilles pour arrêter tout ça. Dans la nuit des temps, Hébreux et Arabes vivaient en paix sans se poser de questions et c’est finalement la quête des terres et du pouvoir qui a détruit tout ça… Mais c’est partout pareil… sauf qu’ici on y est encore, dans la nuit des temps…

Vue de l’espace, la Terre est d’une telle beauté et d’une telle intensité !!! Sachant ce qu’il s’y passe, il ne faut pas s’étonner que les ET de toutes galaxies ne répondent pas à nos messages ! LOL

L’humanité n’est-elle pas en totale opposition avec l’humanisme ?

Mais bon passons…

            Sur la route d’Hébron, la lumière fuse à travers les nuages noirs, quelques paysans vendent leur choux Baladi aux reflets dorés, mais surtout à perte de vue, des vignes à jus de raisins et des abricotiers. Beaucoup de tailleurs de pierre et quelques champs d’oliviers, mais jamais loin d’un Mur ou d’un camp de réfugiés. C’est l’heure des sorties d’écoles et les enfants jouent, encore le cartable sur le dos, leurs cris fusent vers un ciel menaçant…

J’ai vu dans cette même ville, une scène magnifique et pourtant si simple…

Une petite fille de 6 ans, blondinette aux reflets dorés, bouclée, une bouille à fondre, fringuée comme sur un chantier tenant par la main son petit frère de 4 ans, cheveux courts, l’air paumé, les yeux bleutés, crado comme après une sortie au parc, seuls, marchant au bord de la rue, dans le brouhaha incessant des klaxons, et d’une vie de rue si intense, pas inquiets, titubants quand même sur des trottoirs usés par le temps… qu’ils étaient beaux… scène déroutante et si réconfortante finalement. J’ai raté la photo, ou plutôt je n’ai pas osé la prendre, mais elle est à jamais gravée en moi, en couleurs indélébiles que j’espère le temps n’effacera pas.

A Jérusalem, proche du mur des lamentations, une déferlante d’enfants suivis par leur professeur à barbe et chapeau noir élégants… ça court dans tout les sens, ça rigole, ils sont beaux aussi, plein de vie et d’insouciance…

 En fait pour dire tout simplement, que d’un côté ou l’autre du mur, ils sont tous beaux et touchants dans leur innocence et qu’il suffirait d’un champ d’oliviers pour les réunir et les voir s’aimer dans la liberté, et dans l’évidence.

L’être humain en tant que tel, n’est-il pas le plus important ?

C’est quand même la première fois que je donnais un cours de cuisine à des femmes voilées !!! On se serre la main… ou pas… mais pas de soucis pour des selfies à gogo !!! C’était cool ! j’ai réussi à leur faire aimer le riz encore craquant, sur un risotto et une daurade en boudin juste pochée, farcie de coriandre, à la cuisson parfaite (c’est-à-dire pas archi cuit !!!) et c’est bien passé aussi ! comme quoi ! La traductrice, sous son voile discret, était superbe, dans sa simplicité et dans sa douceur. J’ai pu, avec elle, discuter du poids des traditions qui alourdissent le quotidien et les empêche finalement d’avancer à un rythme normal. On ressent dans son sourire tout l’émerveillement que peut être le partage oral et libre entre un homme et une femme. Sans doute ces femmes rêvent-elle que les images de leur Iphone puissent être, un jour, leur réalité !

Comment peut-on cacher comme ça, sans doute, l’être le plus beau qui existe sur terre ?

Je retourne dans les rues du vieux Hébron, où rien n’a changé. Encore la lourdeur sur le cœur, les souvenirs de l’an dernier, les odeurs d’épices et de loukoums, les enfants insistant pour vous vendre un bracelet de tissus aux couleurs de la Palestine, des grillages et grilles maudits, des check-points glacials… mais la vie continue et nous sommes un rayon de soleil pour les petits marchands aux plis marqués par le désespoir et la vieillesse. La vie est toujours là dans de sombres couloirs d’un espoir déchu. Nous sommes leur réconfort, pour un instant, trop rapide, mais nous sommes là, oui, nous sommes là pour les revoir et leur sourire à nouveau, une larme à l’œil, sans retenue. Une larme à l’œil, qui sera toujours là, prête à fondre sur la joue, juste en pensant à ce moment, marqué au fer blanc.

            A Bethlèem, je retrouve mes potes du Jacir Palace, certains sont partis, mais pas loin. L’ambiance en cuisine est toujours bonne, mais il manque des visages, il manque de la sérénité pour que je puisse retrouver l’effervescence de l’année dernière. Manar m’emmène voir Georges et Elias, ça fait plaisir ! j’adore ! Hani et Issa sont là pour moi ! Je parle arabe, à ma façon et on part en rigolades incontrôlables… L’amitié est toujours là, renforcée, pure et sincère. Ils sont heureux et moi aussi.

            A Jérusalem, je retrouve le chef Joseph et toute son équipe (nombreuse)… les débuts sont timides, comme d’habitude, mais ça ne dure pas (vous me connaissez !) et on part sur mon menu entre Maigre et Maftoul baladi aux figues et gingembre, Volaille-orange-olives-labneh…, Houmous sucré et chocolat blanc à la sauge… une certaine idée de la France en Terre Sainte, aux odeurs épicées et fruitées… les grenades tendent leurs jus… Joseph me prépare un Macloubé que l’on déguste avec un fromage blanc… puis je goûte un Knafeh avec une glace à la pistache… une tuerie ! La vue sur Jérusalem est magique ! La visite de la vieille ville est enrichissante, déjà vu, oui ! Mais différente ! Les échoppes à touristes sont trop nombreuses ! Vers le Mur, trop de bruit, on ne s’attend pas à ça ! On ressent toute l’intensité de la croyance au travers des tremblements qu’ont les pratiquants, presque en transe ! Mais dans le même temps, les ados se chamaillent bruyamment et les ouvriers des travaux publics jettent des ferrailles au sol sans aucune discrétion… Le manque de respect est omniprésent… j’avais déjà été surpris par ça l’an dernier, mais j’ai été encore plus marqué cette année ! La ville est belle mais sous tension… Les odeurs des œufs fumés sortent des fours à pain… aux herbes fraîches et épinards non connus… chariots qui courent… plateaux sur la tête… porcelaines d’Hébron… tout de même, c’est un enchantement de parcourir ces rues aux pavés glissants… ici, vous êtes au royaume du Paradis…

            Maintenant il est temps de retourner chez soi. J’ai pu voir encore toute l’immensité de l’amitié et du partage, aux travers de paysages multiples. Comme le dit si bien Claire, La Table est le miroir des relations entre palestiniens et israéliens. On pourrait croire, ou en tout cas on le souhaiterait, qu’un jour le mot Politique soit définitivement supprimé de toutes formes d’écrit et d’oral, mais aussi des mémoires, pour tout simplement être remplacé par le mot Cuisine…

            Dans la vie, comme dans la cuisine, l’inspiration n’est pas quelque chose de contrôlable, c’est là, tout simplement, tout autour de soi…

Posts à l'affiche
Revenez bientôt
Dès que de nouveaux posts seront publiés, vous les verrez ici.
Posts Récents
Archives
Rechercher par Tags
Pas encore de mots-clés.
Retrouvez-nous
  • Facebook Basic Square
  • Twitter Basic Square
  • Google+ Basic Square

MALAISIE/Juin 2017

Première escapade culinaire en Asie

 

Nous sommes en septembre et je peux prendre, enfin, un peu le temps d’écrire quelques lignes d’impressions sur ma mission en Malaisie… (désolé pour le retard !)

 

Vous n’aurez pas, cette fois ci, les pensées et les ressentis forts que j’ai pu avoir en Palestine depuis deux ans… Direction l’Asie, avec pour objectif l’élaboration d’un menu français en duo avec un autre chef français, pendant 10 jours, à Ipoh, dans la région du Pérak, au nord de Kuala Lumpur.

Mes souvenirs sont encore là plus par les odeurs et les goûts que j’ai pu y découvrir… sans doute trop à la fois et trop rapidement pour les intégrer tous et les analyser… L’envie d’appliquer ici quelques découvertes comme ce poulet cuit entier en papillote dans des fours au lit de gros sel… on ouvre alors le papier tous en même temps, puis on le déguste avec les doigts… un pur bonheur dans la simplicité et le partage sublimé… Un resto de rue, sans doute le plus connu d’Ipoh, avec juste un ou deux plats du jour, toujours accompagné d’un riz frit… ce jour-là j’ai foncé sur la tête de poisson… à manger à la malaisienne c’est-à-dire avec les doigts et seulement avec la main droite (se servir de la gauche est une injure pour les musulmans)… j’en veux encore. On se rince les doigts dans un petit lavabo pas si loin, on y fait presque la queue… la cuisine est face à la rue, les odeurs nous envoûtent, épicées, suaves sous une chaleur torride… un chat passe, la queue coupée, comme tous ici, en confiance, sachant qu’ici le resto est pour tous et pour toutes les classes sociales… une vraie mixité, dans un brouhaha intemporel… je suis en suspens, ailleurs, savourant ce moment unique de plaisir… tout ça pour une tête de poisson !!! Ici les restos sont indiens, malais, chinois comme les quartiers entre vieux Ipoh et nouveau Ipoh… en traversant le pont… on y trouve des temples indiens comme chinois, des rues claires et des rues sombres, je suis curieux, je veux tout voir, nous sommes trois européens au milieu de tout ça… et nous sommes des curiosités semble-t-il ! Mais il suffit juste d’un sourire pour effacer nos différences… les enfants nous courent après… Pour le ramadan, des marchés éphémères s’ouvrent ici et là… des odeurs de malade ! Et plein de mets inconnus … ça fume dans tous les sens… c’est trop… j’en peux plus… je veux tout goûter mais c’est impossible ! des grills tournants géants rôtissent les poulets tandoori, les noddles sont poêlés aux épices chili, à la citronnelle et au soja… des laits de soja, des milos, des thés glacés, des jus de cocos à profusion en Ice Bag gavés de glace… on voit des gestes magnifiques… des gestes jamais vus… du bouilli, du rôti, du braisé, du grillé… les épices transcendent l’atmosphère déjà lourde de parfums arc en ciel dans la chaleur humide permanente. Notre petit plongeur (plus de 70 ans quand même) nous rapporte chaque jour des mets succulents et typiques, de là où il faut les acheter… mais lui seul le sait… souvent des bouillons, des petites poches de sauce « surprise » !!! attention ! ça va faire mal… mais je me méfie et ne me fais pas prendre au piège…

Certains matins, nous partons au marché couvert entre poissons qui bougent encore quelques fois, dans une odeur à tuer un cheval, mais pourtant tout est au top de fraîcheur… des poissons de rivière inconnus au bataillon… Un marchand d’œufs aux couleurs sombres cuits au four ou dans la paille, parfois noirs… pas eu le temps de goûter ça !!! On entre dans une ruelle aux étals de mangues de toutes sortes… les odeurs puissantes nous enivrent  et je croque dans un genre de pomme au reflets rouges clairs, qui n’a ni la forme ni le goût d’une pomme… mais c’est bon et rafraîchissant ! Les paniers de coco s’entassent, les centrifugeuses « si on peut dire » sont à plein régime… les jus coulent à flots… et les coques vident s’entassent aussi pour nous donner des idées de fumage ou de braises de noix de coco ???!!! Les herbes envahissent et le pandan impose sa suprématie !!!  Les couleurs sont lumineuses et quelques cafards de 5cm se baladent tranquillement entre crevettes et bouquets de coriandre…

Non loin de là, nos balades nous mènent vers une rue aux milles graffitis, scènes de rue, idées, humour, scènes de travail, icebag de café glacé… Bruce Lee… Dark Vador… ça part dans tous les sens et au milieu de tout ça, en plein soleil, des figues malaises sèchent, gorgées de sucre… une fois séchées, du vrai béton !!! Pour plus de calme et de sérénité, nous visitons quelques temples chinois et indiens. Le temple chinois est un vrai musée de statues de toutes tailles, aux airs sévères ou joyeux, grands, petits, gros… un serpent énorme, des bougies, des couleurs flamboyantes au pied de la montagne… les singes ne sont pas là aujourd’hui… dommage. Des mini temples partout pour vénérer ce et ceux qui nous entourent par le vivant et par l’esprit… Au temple Indien, c’est l’heure de la prière qui est plus une cérémonie en fait, où l’on fait couler sur le dieu, mille et un liquide… lait, curcuma… épuration permanente… les femmes ont des tenues magnifiques et les enfants sont beaux naturellement aux teins sombres mais parfaits. J’ai laissé mes chaussures dehors… elles sont toujours là… le dôme du temple est fait de milles statuettes aux mille couleurs, c’est hallucinant !!! Je pourrais y passer la journée, à penser, à réfléchir, penser…réfléchir… penser… réfléchir…  Dans une cage, quelques paons aux allures magnifiques et majestueuses… un enfant leur tend la main… l’image est dans la boîte… pure et éphémère… le temps s’arrête ici, quelques instants et j’en profite…

Des maisons sont belles aux couleurs vives, volets à persiennes, d’autres sont abandonnées et délabrées… Ici, tout serait possible, pour ouvrir rapidement et facilement un resto… le pays est en plein développement mais en retard par rapport à nous, donc finalement tout semble facile… Je m’imagine une belle fusion entre cuisine française et produits d’ici… qu’attend donc notre chef Yann ? Il pourrait nous faire des crêpes bretonnes farcies d’un riz malais !!! Moi en tout cas, sitôt rentré, j’ai mis le confit de canard à la mode malaise avec une salade de roquette et quelques copeaux de parmesan, presque une révélation !!! On revient chez soi avec un raz-le-bol de manger des nouilles et du riz tous les jours, et finalement au bout d’une semaine, ça nous manque déjà !!! Attention à l’addiction !!!

Je dois y retourner, car les odeurs et les atmosphères sont toujours en moi et je regrette de ne pas être sorti de la ville, allé voir la mer, la campagne, les montagnes… Mon plus grand défi aura quand même été la dégustation du Durian dont l’odeur abominable vous porte sur l’estomac… mais bon le goût est pas mal… un vrai exercice pour apprendre à séparer dans l’esprit, l’odorat et le goût…

A bientôt Malaisia !!!

TAÏWAN 2017

 

Ma dernière escapade m’a fait découvrir Taïwan ou plutôt sa capitale Taïpei… encore plus loin que la Malaisie… de plus en plus près du Japon… une terre de contrastes… entre mer et forêts… aux sommets nombreux… en plein sur la route des typhons.

Ma mission, consistait cette fois ci, en un event privé pour une célèbre couturière-Haute Couture de Taïwan. Petite cuisine, mais fonctionnelle, ouverte… et une petite équipe super motivée !!! Un menu autour de 6 plats, à la française et à la Vincent. Tout était réuni pour faire de cet événement, une réussite… et ce fut le cas à 200% autant pour moi, que pour l’équipe, la cliente et les clients…

Dans le métro direction  centre ville, on passe par des champs de légumes verts, de choux et d’amarante aux feuilles vertes bardées de violet, l’ambiance est lourde et pluvieuse, nous tombons dans 9 jours de pluie, pas de chance…

Notre première ballade sera le marché aux poissons… des kings crab magnifiques à la silouhette élégante, des ormeaux énormes, d’autres crabes mous et des multitudes de coquillages déjà connus. Encore des crabes tous bien disposés, entourés chacun d’une cordelette, l’image est superbe, tant par les couleurs que par l’application de cet emballage plutôt insolite. Les cuisses de grenouilles sont énormes et dodues à souhait. Les cuits vapeur sont en marche et la vapeur nous embaume de milles et un parfums. Nous sommes ailleurs. Le riz dans son emballage kraft aux écritures chinoises semble un luxe dans cet écrin fermé d’un joli cordon. De fines lamelles de bœuf waguy au persillage parfait est emballé. On découvre le Karasumi, ces œufs de poissons séchés, équivalent à notre Poutargue. Du requin, des espadons, des thons et notre premier bol de riz, collant comme il se doit, baguettes armées, une faim de découverte… On passe dans le marché aux légumes et de viandes, pendues par ci par là, aux allures peu engageantes, mais les parfums du poulet cuit à toutes les sauces et du canard laqué, nous font oublier ces visions hétéroclites. On avance, curieux, excités d’être ici. Les concombres sont partout, de toutes formes, de tous goûts, de toutes tailles, de toutes couleurs… Les melons sont parfaits, reflets de beige et tous emballés comme des bijoux. Les Sugar Apples, comme des pommes-ananas, des pommes Malacca que j’avais pu déjà découvrir en Malaisie, et les Guavas taïwanaises (goyaves) à la saveur rappelant à la fois la poire et le fruit de la passion. J’adore ! Les pousses de bambous sont triées et taillées, grosses et petites, une envie de croquer dedans directement. Et je découvre pour la première fois les fleurs d’hibiscus fraîches, d’un rouge grenat profond et à la fois translucide. C’est magique ! J’achète quelques légumes pour faire une ratatouille ! Une odeur d’ail survole. Les patates douces sont omniprésentes, de toutes les couleurs également, mikado équilibriste. Un homme vend des choux et des concombres géants de 10 kg (ouf), il dort les pieds en l’air, serein, dans la lueur humide du matin, un rayon de soleil, une vision tranquille… l’image est fixe et vivante à la fois.

On s’affaire en cuisine, on cuit tendrement la légine farcie d’olives et de magret fumé local, on mixe citron et orange pour en faire des pommades au thé vert, au curcuma et au safran, on blanchit le chou de Bruxelles, on le râpe à cru, on mixe un pesto, on poche les poires et on les grille au chalumeau, on pare le bœuf Waguy d’Australie, on réduit le jus et on y infuse thym et romarin, on râpe la truffe, on cuit les oreillettes et on cisèle le persil, on ajoute du café à la ricotta et on grille les noisettes, on passe les fenouils à la mandoline ainsi que les cèpes, on cuit les gâteaux aux châtaignes et on fait confire les patates douces avec du poivre de Java, on monte la chantilly de chocolat de Java et on prépare les petites pousses… tout roule dans le stress du premier service… mais on sourit et je détends tout le monde par ma bonne humeur et mon « chinois » perso ! Aujourd’hui,  on s’est serré la main… demain, déjà, on se fera la bise. On maîtrise ce que l’on fait, ils apprennent, je profite de l’instant, du partage loin de chez moi, dans la délicatesse de sourires partagés et timides…

Une ballade matinale nous mène vers la tour 101, pour apprécier par cette unique journée de soleil, une vue imprenable sur TaÏpei. L’ascenseur monte et descend en quelques secondes, mes oreilles se bouchent, mes jambes tremblotent… La vue est prenante, profonde et vertigineuse. Les grattes ciel abondent dans un léger brouillard, certains s’entrelacent, d’autres se tordent sur eux-mêmes, les taxis jaunes colorent les rues, les quartiers se distinguent, et l’on peut apercevoir quelques temples aux allures de monuments, et d’autres plus modestes de quartiers. Coincée entre mer et montagne, la ville est dense et trépidante, mais on ressent toutefois une quiétude bienveillante. On reprend le métro, trop nickel pour être vrai, et pourtant ! C’est un hôpital ou un métro ? On fait la queue sur le quai, disciplinés,  suivant des lignes marquées au sol. Sur les murs, des affiches gigantesques et mannequins chinoises magnifiques, visages dans toute la perfection et l’innocence. Ce métro là sera paré d’un vinyl de bibliothèque, un autre de Hello Kitty…

Notre première sortie au resto, fut une belle réussite et une belle découverte : de beaux calmars géants grillés sur le vif en brochette, le tofu puant frit « une révélation », de jolis coquillages aux herbes et petits poireaux, des alevins de poissons en beignets, des gambas au gingembre, du chou à la couleur et au craquant incomparable, du poisson poché dans un bouillon épicé, des couilles de poulet au gingembre et coriandre (so strong), des beignets d’huitres… la magie opère… Le lendemain on découvre la fondue chinoise, avec poissons, légumes et viandes à tremper dans différents bouillons parfumés eux-mêmes de baies de gogi, de ginseng et autres épices aux goûts subtils… avec ma petite équipe de cuisine, un vrai partage, un moment de bonnes rigolades… Je ne pourrais décrire tout ce que nous avons dégusté entre cuisine de rue, resto de chaînes, resto à sushi, resto branché ou resto d’hôtel maxi luxe… mais ce qui est sûr c’est que nous avons tout goûté, apprécié ou pas, mais la découverte fut grandiose et palpitante pour nos papilles. On peut rentrer chez nous pour refaire des bouillons, frire le tofu, déglinguer un poulet de A à Z, pocher de la méduse… nous essayerons de comprendre la recette du Cong you bing et nous ramenons dans nos valises 2 kg de perles pour faire des Bubble Tea en famille… Elle est pas belle la vie ?

J’ai rencontré des personnes hantées d’une bienveillance et d’un respect extraordinaire… S’il n’y a à Taïpei, finalement pas grand-chose à voir, car elle reste une ville moderne aux quartiers typiques, les gens qui y vivent sont d’un accueil à la fois timide mais sincère et généreux. Tout le monde nous a fait des cadeaux, même certaines personnes rencontrées qu’une seule fois ! Et nos valises se sont remplies toutes seules aidées tout de même par quelques sachets de thé, de couteaux magnifiques, et de fringues chinées dans un quartiers où il n’y a que ça sur un gros paté de maisons…

On s’étonne de ne voir ni chiens ni chats…

On s’étonne du papi qui débarrasse les rues des tas de poubelles sur une trottinette motorisée totalement improbable et ça monte dans les étages !!!! Du délire…

On s’étonne de mini palais dans les quartiers surgissant de nulle part, d’une richesse  et d’un éclat magnifiques… On profite des encens, de l’ambiance rougeoyante, de milles et un éclat de brillance, de statuettes aux visages menaçants… On a presque peur ! C’est beau, magique…

On s’étonne de voir dans les quartiers branchés, les jeunes étudiants tous en uniforme, à la sortie des cours, envahissant les trottoirs et profitant de l’instant pour déguster la fameuse glace à la mangue avec un genre de granité au lait… Une vraie tuerie ! Nous on la dégustera assis dans un recoin, à la sortie des chiottes… Typique ou atypique !!!??? LOL

Mais il est temps de rentrer chez soi, de digérer toute l’amitié qu’on a pu recevoir, tout ces gestes simples et si humains, toutes ces saveurs et tous ces parfums… Le temps s’est arrêté, un temps… Sans s’en apercevoir on a vécu une fenêtre de vie, belle et savoureuse… pour une belle page de souvenirs…

Loin de chez soi on est bien, chez soi on est bien aussi, et heureux d’y revenir…

L’Afrique du Sud, voyage en terre « rêvée »

Mars 2018

 

 

                Merci  « Good France » de m’avoir permis d’aller dans ce magnifique pays aux espaces gigantesques et aux vues inoubliables…

                Pour rappel « Good France » c’est l’événement annuel des chefs qui vont à travers le monde, porter la bonne énergie de la cuisine française, mis en place par le ministère des affaires étrangères  sous l’impulsion du chef Alain Ducasse. La connaissance, l’amitié, le partage pour un métier de passions et de convictions.

                J’ai eu peu de temps pour le tourisme, mais cette vision du Cap est ancrée dans ma mémoire. Le vent déchire les paysages emplis des lueurs d’un coucher de soleil. La pureté de l’image vous transperce, comme une révélation d’être arrivé au bout du monde, nappé de nuages mouvants,  caressants «  la Table Montain ». La ballade est rapide mais enivrante, tant le bonheur d’être ici est immense. Je profite de chaque seconde et j’hume avec délectation les embruns chargés d’odeurs nouvelles. Je détache chaque feuille que je croise, la frotte et la sens pour imprégner mes souvenirs de sensations réelles. En soirée, je déguste un Ostrich Burger poire-gorgonzola,  immense et m’en fout plein les mains, ça dégouline et c’est trop bon. Quelques Boboties, genre de boulettes de pates-béchamel en croquettes… et un dessert glacé à l’Amarula (un peu comme du Baileys, version caramel)… la soirée est belle, une légère brise, je suis bien. Le lendemain c’est interview et émission TV pour l’émission Expresso et le journal Sunday Times, quelques petites visites et je reprends la route vers l’aéroport, longeant les Townships aux allures variées… pas le temps de les vivre, ça sera pour la prochaine fois, car l’Afrique du sud c’est aussi ça !!! Et je souhaite vivre cette expérience, partager et discuter avec les gens qui y vivent… y apporter quelque chose si c’est possible. Les paysages vus du ciel entre Le Cap et Johannesbourg sont immenses de solitude et d’aridité… et  les reliefs sont marqués comme les rides sur un homme d’un certain âge. C’est beau comme la Terre est vivante…

                Retour à Prétoria, pour parfaire avec Philippe Faure-Brac, la conférence de presse à la résidence de l’ambassadeur. Une centaine de convives autour d’une dégustation de vins français et Sud Africains, et quelques bouchées travaillées, comme l’œuf mimosa au foie gras, la gamba-ratatouille et chantilly chocolat blanc-roquette, l’agneau sur un risotto à la manière basque, un velouté de gambas au cumin et enfin un gâteau aux noix, coulis de framboises et crème légère de pruneaux au cognac. La soirée est douce, fluide, le lieu magique et les rencontres plus qu’intéressantes et variées. L’accueil de toute l’équipe est au top. 6h du mat, départ pour une autre émission TV pour quelques minutes d’antenne et intervention dans une école de pâtisserie où je peux échanger et transmettre les sentiments que peuvent m’apporter les voyages, raconter ma vision d’1 étoile au guide Michelin, partager les émotions qui peuvent me traverser lorsque je cuisine … La cuisine n’est évidente que lorsqu’elle vient du cœur…

                Au Four Seasons de Westcliff de Johannesbourg, j’ai vécu l’effervescence d’un lieu magique, perché dans la verdure de cette ville en renaissance…

                Labyrinthe infernal, n’oubliez pas votre guide pour vous retrouver dans ce dédale de cuisines, de restaurants, de terrasses… En pâtisserie, on étale les focaccias, on monte la mousse aérienne de fruits de la passion, on cuit mes petites madeleines au boudin qui accompagneront la garbure à la crème de parmesan et chorizo Révilla, on monte une mousse au chocolat que l’on étale finement pour la faire sécher et en faire des tuiles, on cuit la courge pour mon milla à la vanille et on râpe le fenouil. L’huile d’olive participe activement aux senteurs de Provence qui flottent… et j’en rajoute un peu avec mes merveilles aux pruneaux et au safran… La friteuse dégage ses vapeurs sucrées… Le fourneau s’échauffe au rythme des sauteuses d’œufs brouillés, des poêles de bacon fumant et champignons sautés… Et oui ce n’est que le petit déjeuner, mais déjà ça fricasse et ça mijote dans tous les sens. Les os d’agneau colorent au four, qui donneront un jus dense et intense, sur des flaveurs de thym, de basilic et de romarin. Un cordon suffira pour dorloter la selle rôtie, la panoufle croustillante, le risotto de châtaignes, les croustilles de comté et les calmars juste saisis au dernier moment avec ail crashé et persil ciselé « entre tiges et feuilles »… Aux entrées du Flames, ça bosse dur-dur, légumes grillés, salades, marinades… carpaccios d’autruche et de kudu… l’invasion vient des herbes et des pousses… On cuit les oreilles de cochon, on fricasse les champignons sauvages, on blanchit le chou… on mélange tout ça et on tasse le tout pour une belle compression gourmande qui flirtera avec le merlu vapeur, la sauce bordelaise et la moelle aux olives. L’équipe est gaie et bosseuse. L’ambiance est dans les sourires et je bouscule ma joyeuse équipe physiquement et verbalement dans la bonne humeur. L’écoute est attentive et j’apprends à connaître chacun dans sa singularité. La blanquette de veau sera décalée entre modernité et classicisme, chaud-froid, cru-cuit… version 2018 à manger à la cuillère… vision cocktail ! La sauce crémeuse sent bon les zestes de citron et la coriandre. Les coques et les huîtres sont à peine pochées pour en faire un flan qui accompagnera le thon grillé aux allures niçoises. Pendant le service je peux voir quelques extraits du menu dégust’ avec des dressages millimétrés autour du bar fumé, du filet de bœuf, du chou fleur en textures, du tofu fumé, de belles St Jacques rôties, les légumes sont grillés au moment… le service est plutôt décontracté, ça roule. Sur les terrasses, ça grille de toutes flammes et ça croustille dans le four à voute, le Rib Eye est énorme et délicieux ! La fin de service approche, nous sommes dimanche et je vais profiter de ma seule soirée off… alors vite, vite, on accélère… mais le temps se couvre et en quelques minutes ça tombe de folie, pluie, grèle, on n’y voit pas à 2 m devant soi. C’est comme des torrents et des cascades dans les escaliers qui mènent aux terrasses, c’est beau mais j’ai les pieds dans l’eau… furtivement  pour faire place au soleil, à l’arc en ciel, à une lueur pure, à une vision nette.

L’heure est au tourisme concentré.  Johanesbourg est tranquille, vide. Je suis marqué par le mélange des immeubles modernes et ceux beaucoup plus vieux mais magnifiques, mais surtout par un nombre impressionnant d’immeubles abandonnés, délabrés, squattés ou pas… presque une ville morte surtout par ce dimanche après midi… on ose s’aventurer dans des quartiers à risque (ou pas), on traverse le quartier d’affaires, nickel, presque décalé ou ailleurs, pour finir par la place Gandhi, dont la statue est si petite (trop d’ailleurs) pour une place comme celle-ci et pour un homme tel que lui !!! Direction Maboneng, le quartier branché des restos et de la mixité, de la fête, et ce ne sont que 2 rues !!! Graffitis dans tous les sens, de Mandela à Robert de Niro… Une fillette chante en jouant de la guitare, c’est superbe et inattendu. On boit un coup au resto Argentin, sur un air de Syrah ou d’un joli Chenin, la grillade est immense, selfie obligatoire avec le chef, combat aux couteaux dans l’enfer des flammes… Un spot presque secret laisse apparaître des galeries d’art, et sur les hauteurs, une terrasse à l’ambiance Salsa, chaude et déshabillée… ça rigole dans les bars, ça picole et ça fume, il est 18h et certains sont déjà à la ramasse !!! j’achète un collier pour ma partenaire de cuisine, Ivoire et Zèbre. Un toit de resto est fait de parapluies illuminés, les graffitis sont mis en lumière par le coucher de soleil, c’est ennivrant et reposant. Soirée au Marble Restaurant, hyper branché, cuisine sympa à la flamme… antilope grillée et chocolate sandwich en dessert. Le lieu est magique, open…

                Chaque jour est une chance pour renforcer les liens avec l’équipe et découvrir de nouveaux visages…

 

                Les rencontres furent belles et attachantes… pour mieux y revenir…

Palestine, Jérusalem… 2018

 

                Déjà ma troisième année de découverte, de ce pays, presque coupé du monde ou bien en plein au milieu… pour une escapade un peu plus au nord, entre Naplouse et Jenine… pas si loin de Nazareth, mais là on entre en Israël ! De nouvelles rencontres en terre inconnue, ou presque, dans l’agitation incessante, nuages de poussière… et paysages brumeux aux frontières du Jourdain.

Je retiens de ces routes, les visages souriants et rigolants d’enfants à la sortie des classes longeant les routes et croisant des soldats armés jusqu’aux dents. L’image est étrange et à la fois presque naturelle dans un paysage rempli de contrastes. La traversée de montagnes d’oliviers et de quelques champs de tabac est superbe, sous un lever de soleil printanier. Les brebis gambadent sur une terre fertile où se mélent  fenouil sauvage et  fameux zaatar. Sur les collines, quelques moutons et leur berger nous ramènent un peu loin dans l’histoire… certains paysages me rappellent la Toscane par les multitudes de cyprès alignés. Au milieu de rien, une allée gigantesque de palmiers « façon Miami » mène à une petite ville de riches palestiniens. On traverse quelques villages aux allures hétéroclytes, marchands de pastèques et des pains pita sur mille échelles… ça sent bon le fumé, l’odeur du pain est prenante, à la fois suave et « mélancolique »…

 

                Première étape : Jenine, pour 2 dîners. L’accueil est convivial, même fraternel. En cuisine, c’est le doute… la crainte de l’inconnu… vite estompée par mon énergie, déployée à faire partager mon enthousiasme et ma soif de transmission et de découverte. Lever un saumon en quelques minutes suffit à mettre le ton ! Le marché du matin est effervescent, ça bouge dans tous les sens… mais en fait c’est comme ça toute la journée et même le soir… ça vit sans arrêt… c’est génial… première leçon de vie et d’attitude ! ou mieux de coutume ! On voit surtout beaucoup de gros radis roses, de romaines, de nèfles, de mûres platanes et de pois chiches frais. Les poissons sont rares… daurades, mulets… et les boucheries un peu déroutantes… Les petites courgettes sont superbes, à la peau claire et qui fricotent avec les dattes medjool… pas besoin de réfléchir du coup… le plat est déjà là devant mes yeux… dorloté par des sacs d’épices. Il reste quelques fraises « fin de saison » qui seront la base de ma salade de tomates, et les choux fleurs sont toujours là et ils seront confits… à la coriandre. Pour le saumon, un bon gratin dauphinois au Zaatar et le tour sera joué… On bosse en cuisine et la détente est rapide. Les questions affluent, de tous genres… je suis la curiosité du jour et on en profite. La confiance s’installe dès le deuxième jour et le chef me prépare un Mansaf d’agneau aux amandes, avec du fromage battu et un goût puissant de cardamome, une vraie tuerie. Il souhaite que je suive toute la fabrication de son plat, je sens qu’il veut absolument partager tout ce plat avec moi, comme un pacte d’amitié, la vraie. On lance une crème pâtissière au Zaatar et à la menthe et un Taboulé de boulgour fin version dessert riche en fruits, en jus d’orange et en herbes fraîches. L’équipe est heureuse. Partir de cet endroit, me fait bizarre… j’ai l’impression d’y être resté 15 jours, alors que je n’y suis resté que 2 jours. Avant mon départ un petit tour de ville où je découvre un bar-lounge, rendez-vous des bridgeurs et des fumeurs de narguilé. Le lieu est vieux, hétéroclyte, il faut traverser un brouillard de fumée pour découvrir les petits salons privés où chaque chaise et chaque fauteuil a une histoire, découvrir aux murs mille et un objets, de mille et un pays… c’est fou et unique. Dans la rue, on moud devant moi quelques grains de café et on y jette une cuillère de cardamome moulue avant de refermer le sac. Je bois un verre de Caroube, comme un sirop trop sucré mais toutefois rafraîchissant. Les rues sont bruyantes et dans un nuage permanent de poussière.  L’envie du dépaysement total est assouvie sans problème, dans le bruit presque assourdissant,  simplement, de la vie. Des collines je peux apercevoir au loin, Israël et la ville de Nazareth.

 

                A Naplouse, située entre deux collines, j’écoute dans la nuit, l’appel à la prière du soir, le moment est calme, évocateur de respect, un point d’arrêt dans le temps, l’espace d’un instant. Dans les rues, parcourant le marché, mille et un parfums, mais surtout des effluves d’aubergines brulées qui entreront dans l’élaboration de leur caviar bien aillé ! Ca décoiffe ! Je découvre les cerises non mûres au goût acide intense dont ils raffolent… moi moins… et les Akoub, genre de chardon que je n’ai pas eu le temps de goûter finalement… Dans une ruelle ça sent le sirop et le safran léger… Lieu mythique de la fabrication du Knaffeh, un gâteau de semoule et fromage frais au safran et curcuma… Les gestes sont beaux et la dégustation inoubliable. Ça fond, ça craque, ça sent le miel, tout le monde se jette dessus et je prends des petits jeunes en photos prêts à faire la pause ou quelques grimaces de plaisir … Un jeune garçon qui prend des cours à l’institut nous invite à visiter la savonnerie de ses parents, qui a sérieusement traversé les ans, et nous explique le procédé « presque » moderne… un folklore d’odeurs miélées… l’énergie dans cette ville est positive presque apaisante.

 

                Pour finir, je pars préparer mon dîner à l’Américan Colony, à Jérusalem. L’hôtel est comme une petite oasis, le jardin potager est décoré de multitudes de pots en terre… petites feuilles de laitue, céleri, thym, roquette, betteraves… le paradis des petites pousses au naturel !!! tout ça partira dans mon amuse-bouche, une daurade servie froide sur un flan d’un thé au lait à la sauge version salée…  Je poursuis avec les petits pois à la française plutôt revisités sur une version plus moderne, plus visuelle, plus en textures… Ce soir on partage les plats avec le chef et il part sur une petite tourte d’agneau et des St-Jacques Houmous au dressage très fun. Pour le dessert,  je monte un cannelloni d’aubergines rempli d’une ganache Ivoire-chocolat blanc au zaatar, une salade de fruits autour des grenades, tomates, concombres… et basilic… très peu sucré, sur la fraîcheur. La soirée est belle et les clients savourent la découverte. J’en profite pour découvrir la vieille ville en mode «alone», c’est top ! Un petit vieux palestinien fait le pitre en montrant ses muscles devant les soldats israéliens, c’est trop drôle, pour les soldats aussi, la scène est unique dans son humanité ! La visite d’un producteur de Tahini est superbe, ça sent le sésame toasté et je goûte un tahini de nigelle qui déboîte… Je profite du côté Est et Ouest de la ville en simple touriste en soif de voir et d’apprendre. Soirée fromages avec l’équipe et fin de soirée plutôt bar bar, tard tard…

 

Et j’en passe…

 

 Le voyage semble encore être une belle découverte de nouveautés, entre les lieux, les paysages, les odeurs, les ambiances et les personnes rencontrées.

 

Cette destination deviendrait-elle une addiction ?

Roulement de tambours… l’année 2019 est déjà bien entamée en ce mois de janvier froid et brumeux… L’horizon s’ouvre à nous, toujours illuminé d’expériences nouvelles, qu’elles soient dans notre beau Périgord ou bien loin d’ici… voyages, voyages…

L’Afrique du Sud fût cette année ma destination principale et je remettrai le couvert encore cette année pour de nouvelles aventures encore plus diversifiantes…  Safari, quel délice ! Oui, dégustations de game cru ou cuit… Les sons du bush sont présents en moi, les levers de soleil à 4h du mat, l’excitation d’une vision longue ou furtive d’un animal sauvage, le souffle chaud et asthmatique du rhino, la chasse du lion fainéant, l’élégance des girafes, la discrétion des hippos, les bonds délirants des impalas, la bronzette des guépards… que dire ! Et cette insatiable curiosité d’aller goûter n’importe quelle herbe qui pousse par ci par là…  L’excitation est omniprésente chaque matin. On se demande ce que l’on va pouvoir voir, à quelle distance et quel spectacle magnifique la nature va nous offrir. On est gonflé à bloc, tant le dépaysement est total. A Joburg, je découvre Constitution Hill, la prison qui a vu Gandhi et Mandela… une belle émotion… mais il faut entrer d’âme et d’esprit pour ressentir le poids du passé et se confondre avec les photos prises. L’une d’elle, lumineuse de sentiments, montre en premier plan l’entrée des cellules individuelles et les barbelés en haut des murs, en arrière plan, au loin, des enfants jouent au foot, dans la rigolade et l’insouciance du monde dans lequel ils vivent… L’histoire est lourde ici, mais où ne l’est-elle pas ? Une autre est celle des lits faits de couvertures à l’intérieur des cellules, le soleil éclaire la photo d’une manière presque religieuse, directement venue des cieux, quelques secondes elle nous fait oublier ce qui s’est passé ici. Avec Nellie, on prend un taxi collectif prévu pour 10 mais où on s’entasse à 18, c’est folklorique et risqué paraît-il ! On passe par un quartier hyper craignos, où la première chose à faire est de planquer son portable et tout ce qui dépasse… A Soweto on peut voir KlipTown, le pire des bidonvilles de cette banlieue cheap mais où ça vit, ça vit, comme j’ai pu le voir en Palestine encore cette année à Jénine ou à Naplouse. Comme d’habitude je reste scotché par la beauté des enfants, leurs sourires, accolés contre des graffitis engagés et arc en ciel. Un soir, Amanda, nous emmène dans un resto de Tembisa où on s’est retrouvés au milieu de 300 noirs, nous dévisageant comme des extra terrestres… une expérience déroutante, mais utile. Nous sommes comme eux, nous n’avons rien à faire avec le passé ! Sentiments et Rires sont identiques à toutes les couleurs de peau… Après tout nous sommes tous des Sapiens !!! (oui, j’ai acheté le bouquin, donc fallait bien que je le place quelque part). A côté de ça, Maboneng ou Victoria Yards sont des lieux atypiques  où se mêlent marchés, musiques, potagers, artisanat, restos éphémères et où l’ambiance est légère comme une plume au vent. Les courants d’air sont chargés de rires et de sentiments sincères, d’émotions partagées, comme une atmosphère libératoire. C’est dimanche, toutes les églises sont ouvertes et on parvient à écouter les chants vivants « oh oui, que c’est vivant ! » qui en sortent comme des fumées pénétrantes et épaisses qui pourraient vous envoûter et vous faire chavirer dans un nirvana furtif. Les odeurs de braï sont agréables et se baladent au gré d’un vent léger et chaud. Le retour à la vie périgourdine en plein mois de décembre risque d’être très déconcertante… vivement noël…

D’année en année, l’activité est de plus en plus difficile, il faut se battre pour rester à chaque seconde dans la lumière, toujours actif et réactif. Epuisement mental dont les solutions ne sont jamais évidentes. Mais on avance toujours avec énergie et conviction. L’amour s’embrase et l’on redémarre une nouvelle vie basée sur l’avenir et laissant derrière nous les meilleurs souvenirs et l’expérience. Mais ce n’est qu’une parenthèse avant notre grand tournant final…

A tous, on vous souhaite que 2019 soit douce dans vos corps et timbrée dans vos têtes… à l’action…

2019, Afrique du Sud, Kuala Lumpur, Italie et j’en passe … terres de découvertes

Potchefsroom, ville improbable vous me direz à 2 h de Joburg, très afrikans, très étendue, peu de choses à voir à part l’allée des chênes en plein centre ville, l’invasion d’universités, espaces arides à perte de vue par cette saison vraiment très sèche. Rouler crée de multiples nuages de poussières sablonneuses, far west d’aujourd’hui, tourbillons orangés étouffants. Je suis là pour élaborer mon premier Movie Eat Along, pour SoChef, un évènement crée par l’Alliance française, sur 2 semaines, ayant pour objectif de promouvoir la cuisine française et surtout la partager de façon libre et ouverte. 92 couverts, une équipe de jeunes d’une école de cuisine, le film « Haute Cuisine » avec Catherine Frot retraçant l’histoire magique de la cuisinière privée de François Mitterrand, Danielle Mazet Delpeuch. Mon boulot, servir sur le même timing que le film les plats qui passent à l’écran… de façon classique ou revisitée. Joli challenge en texte et en musique. Ambiance swing and smile. Saumon en chou farci, velouté, carottes crues à la muscade/Oreiller de la belle Aurore, vinaigrette de petits pois (recette simplifiée, car j’avais pas 3 jours pour le faire et pas non plus de foie gras, de pigeon et autres volatiles emblématiques)/Faisselle aux amandes, sirop de fleurs de sureau (normalement un dessert, que j’ai retravaillé en salé avec des herbes fraîches et une salade de chou kale)/Chaudrée (une sorte de bouillon de poissons et pommes de terre)/St Honoré à l’estragon que j’ai servi déstructuré. L’expérience fût totalement stressante car c’était ma première fois ! et totalement trippante, car c’était ma première fois « Lol ! ». Le lendemain, départ pour Pretoria, après un bon petit déj avec Randi et Alison, et un bon petit œuf « Sunny Side Up », une vraie poésie ! Une petite démonstration dans une école privée pour se mettre en jambe. Ambiance de folie !!! L’asperge, sauce mousseline, un grand classique français… mais je leur fais 6 assiettes sur le même thème, pour leur montrer qu’il n’y a pas qu’une seule cuisine et qu’un plat peut être vu de mille façons. Quoi de plus libre que la cuisine ? Les rues sont lumineuses et bleutées, les pétales  au sol reflètent le ciel et les Jacarandas en pleine floraison. Sur une des collines de la ville, je fais un tour par Union Buildings, avec Bertrand et Hugo pour admirer la statue gigantesque de Nelson Mandela. Touristes et locaux se baladent dans les jardins encore asséchés. Quelques mannequins se font tirer le portrait, une fille noire en robe blanche, une fille blanche couleur de lait en robe rouge, le contraste est merveilleux, l’instant et le lieu bizarre pour faire un shooting, aussi amusant finalement… Ces villes d’Afrique du Sud sont différentes ! Les centres villes sont dangereux et malsains, le contraire de chez nous finalement ! Pour une autre démonstration dans une école de cuisine, je choisis de me mettre en danger et de partir sur un panier-surprise. Ça défonce et ça vide totalement de faire ce genre d’exercice ! On doit cuisiner, parler, plaisanter, faire bosser ses commis, être créatif, parler anglais, surprendre, répondre aux questions… c’est exaltant et épuisant mais si excitant !!! Sitôt fini, c’est l’heure des photos… faut toujours prévoir au moins 45 mn !!! On m’offre des bouteilles de Chenin, des Koesisters (beignets tressés) ou des Boerewors séchées (saucisses), j’adore les trois… Le partage avec les élèves pour préparer le dîner du soir est toujours aussi passionnant. Je dois rester à nouveau sur l’esprit français, comme pour ce croque-monsieur Biltong et avocat ou un riz au lait totalement maïs. Le plus beau dans ces voyages n’est pas ce que l’on peut apporter aux autres, mais plutôt le souvenir qu’on leur laisse. J’ai aussi eu des clients, qui étaient des anciens employés du Four Seasons de Joburg, et je ne vous raconte pas l’émotion que j’ai eu par cette surprise tout à fait inattendue…. Ça m’a même déstabilisé pendant quelques minutes ! Un moment pur, fort et si simple ! Le nouvel ambassadeur, a appris que j’étais là pour cet événement et a tout fait « énergiquement » pour que je vienne lui faire un repas à la résidence pour quelques invités. C’était ni prévu, ni organisé… tout ça en 2 heures entre langouste, denti et quelques avocats en dessert… Drôle de situation ! Dépaysante ! Ce nouvel ambassadeur est si cool et détendu ! Sa femme si naturelle ! Ma deuxième semaine se déroule à Durban, ville au bord de mer. Les plages sont larges et les tempêtes de sable décoiffantes. Ici, nous sommes dans une grosse communauté indienne et l’on trouve des curry à profusion comme les boboties (pain fourré d’un curry) et quelques découvertes à Blue Lagoon aux multiples échoppes. Nous rentrons avec Anobla dans un shop africain et n’en sommes ressortis qu’une heure plus tard ! Un gros guet-apens genre shooting photos en habits traditionnels… mais pas pour moi ! Ce fût assez hilarant. On continue les cours de cuisine et les dîners à 4 mains, notamment au Beverly hills Hôtel !!! Un petit complet ça fait plaisir, un petit curry aussi. La visite du centre ville est rapide car peu sécurisante. L’hôtel de ville est impressionnant et imposant. Je ne vois aucun blanc, je me sens un peu seul et ne fais pas le fier. Déborah nous emmène dans une réserve privée super sympa. Là, quelques beaux spectacles à la lueur d’un coucher de soleil. Deux girafes en plein câlin s’entortillent, se poussent, se frottent… l’instant est magique ! Un peu plus loin les petits sons stridents d’un bébé rhino cherchant à téter sa mère, émouvant. Près de mon hôtel, les singes pullulent, là comme ça dans la rue, avec leurs bébés, cherchant surtout de la nourriture. Ici les gens ne les aiment pas car ils peuvent être agressifs et sournois, du coup ça leur arrive même de les repousser violement. Le dernier jour pour l’alliance française, je prépare un repas très français autour d’un saumon Ratatouille, d’une blanquette et d’une tarte Bourdaloue. Un vrai succès, très et trop copieux, même pour eux !!! Cette ville est très peu touristique à l’internationale et c’est dommage car il y a des choses à faire. C’est surtout une clientèle locale, en week end qui choisit Durban au lieu du Cap. Du coup aucun resto français et très peu d’ouverture et d’opportunités pour cela.

Ma dernière étape fût bien entendu une petite journée au Four Seasons de Joburg, juste pour voir toute l’équipe et passer un moment privilégié de tranquillité et retrouvailles émouvantes. On en profite avec Franck pour aller voir Afrikoa Café, un lieu en devenir autour du champagne, d’un chocolat pur Tanzanie et de jolies pâtisseries, dans le quartier huppé du Marble Restaurant. Une belle rencontre et un joli potentiel… Tchao l’Afrique du Sud…

 

J’adore la Malaisie, ce fût ma deuxième fois, mais je restais cette fois ci à Kuala Lumpur pour un événement au Ruma Hôtel pendant 6 jours. Le concept était très intéressant. Je devais préparer 3 dîners autour de 6 plats et sur le thème des couleurs de l’automne (vert, jaune, orange, rouge, pourpre et marron). La Malaisie est un vrai mélange de culture, entre les malais bien entendu mais aussi les chinois et les indiens. De ce fait, la cuisine y est forcément dépaysante surtout lorsqu’elle twiste de façon pertinente avec ces trois origines. Les marchés sont extraordinaires, on en prend plein la vue. Les ruelles sont tapies d’une poudre de coquillages, écrasés par le temps. Les poissons- chats bougent encore, certains poulets sont noirs, les maquereaux font la taille d’un saumon, les légumes sont inconnus et délicieux. Le rêve ! J’avance à petits pas pour éviter abats jetés au sol ou têtes de poisson. Je m’imprègne d’une vision grandiose et hétéroclite pour oublier l’odeur nauséabonde qui règne, pourtant là où tout est encore pratiquement vivant !!! Les journées sont lourdes au milieu de ce dédale de tours, toujours plus hautes pour dépasser peut-être les Petronas Tower, qui dans la nuit sont une auréole scintillante. Les orages sont violents et furtifs, la couleur du ciel se transforme en un gris orangé, le grondement se rapproche comme une ombre sur la ville en pleine effervescence. La population se terre dans les Moles, qui envahissent l’espace underground … de vraies villes sous la ville. Pour mon dernier jour, je flâne avec Tyson dans le Chinatown pour un côté un peu plus touriste, les échoppes étant encore en sommeil à cette heure matinale. Direction le temple Hindou dans la grotte à la sortie de KL. Le lieu semble hors du temps et il faut se motiver pour monter les interminables marches nous menant à l’intérieur de la grotte à ciel ouvert. Le regard est ébloui de mille couleurs entre les monuments et les habits traditionnels. On entend des petits cris dûs aux singes qui sont partout et qui cherchent à voler n’importe quoi, entre lunettes, portables et bouteilles d’eau… j’adore ! Puis les gémissements d’une femme qui monte toutes ces marches à genoux comme pour une expiation volontaire !!! Une famille porte un enfant dans un drap, la famille est autour, ils fredonnent et nous laissons le passage, plutôt abasourdis par cette scène emplie d’émotions. Au-delà, ce sont les cérémonies de purifications qui ont lieu dans le temple aux chansons harmonieuses et languissantes… les statues de paons nous surveillent… vigiles d’une religion et de traditions ancestrales. On souhaiterait s’asseoir si le temps nous l’autorisait, entrer dans cette méditation nirvanesque. On ressent à la fois le bonheur et le désarroi, à chaque pas.

Bye, bye Malaysia !!!

 

L’année se terminera sur deux dîners à  4 mains, l’un avec Antonio Ziantoni, à Rome, un jeune chef foufou en devenir et l’autre avec Davide Maci, sur le lac de Côme, un chef calme. Rome est extraordinaire, tant de choses à voir, les monuments gigantesques. La ville est dans un bouillonnement infernal. Pas de doute, nous sommes bien en Italie. Ici la Carbonara, c’est la vraie, sans crème, une pure merveille. Chaque repas ne peut se passer d’une pâte cuite au moment, roulée harmonieusement dans son jus de cuisson, l’Italie s’élève et se révèle. Le voyage devient une émotion particulière à elle toute seule. Au Lac de Côme, c’est le désert et il fait froid, il pleut. Trop triste, mais c’est quand même beau. La lumière est pure, l’air montagnard. C’est le moment du marché de Noël… parmesan et gorgonzola se chamaillent. La ville s’habille de magnifiques images lumineuses sur toutes les façades. L’esprit de Noël se ressent déjà, les clochent sonnent, déferlante de sons poignants. Avec Anne, nous filetons 6 kg de petits rougets, du vrai délire !!! Le foie gras s’habille en vert, le chou de Bruxelles en déclinaison l’est déjà, explosif… le rouget s’habille en grenade, le merlu sent et s’enrobe de canard…

 

On s’exporte, humble, gai, sincère, curieux, respectueux…

Nuances de gris et de couleurs, sentiments tristes et joyeux…

Les paysages empruntent les sentiers des souvenirs…

Les odeurs enivrent l’imagination…

La vision du monde s’élargit petit à petit et l’on s’ouvre petit à petit à la vraie vie…

Celle qui nous mène petit à petit à tous nos rêves…

  • Facebook Black Round
  • Instagram Black Round
  • Twitter Black Round
  • Vimeo Black Round
bottom of page